Rencontre avec Simon Luginbühl au Polo Club De Veytay à Mies. Découverte.

Ou es tu né et où as tu grandi? 
Je suis né à Genève, mais j’ai toujours vécu ici à Mies, au sein du Polo Club de Veytay.

Joueur professionnel de polo, manager du Polo Club de Veytay, et organisateur du Jaeger LeCoultre Polo Masters, raconte nous ton parcours.
Le tout s’est fait assez naturellement et progressivement, à la suite de mon père qui a développé le polo à Veytay il y a bientôt 30 ans. Petit j’ai d’abord joué au football, et je n’ai commencé à monter à cheval et à taper la balle que vers 12 ans. J’ai continué à pratiquer les 2 sports parallèlement pendant une dizaine d’année, mais le polo a rapidement pris le dessus ! En ce qui concerne le côté organisation des événements et gestion de l’entreprise, j’ai toujours eu beaucoup de plaisir à aider mon père après l’école, les weekends et durant les vacances. Jusqu’en 2007 nous engagions également chaque année un polo manager externe pour gérer l’école de polo et organiser les matches. Durant mes dernières années d’université (Masters en relations internationales à Genève), j’ai repris ce poste, et je ne l’ai plus quitté depuis ! J’ai également repris l’exploitation agricole familiale en 2010, ce qui faisait un peu beaucoup à gérer tout seul ; mon frère Martin s’est d’abord joint à moi de 2011 à 2014, puis lorsqu’il a décidé d’aller relever de nouveaux défis, c’est mon épouse Marine qui m’épaule au jour le jour.
Le fait de porter différentes casquettes est très grisant car chaque moment de la journée est différent, et même si certains moments de la saison sont certes très chargés et  peuvent s’avérer épuisants, j’ai beaucoup de plaisir à me lever chaque matin.

Comment es tu entré dans ce sport? 
Au début, je dois avouer que je n’étais pas très intéressé par le côté équitation ; mais dès qu’on m’a mis un maillet dans la main et que j’ai pu commencer à tapoter une balle, j’ai été très vite conquis. Aujourd’hui, c’est le côté tactique ainsi que la relation avec le cheval et la gestion de son quotidien (soins, nourriture, entraînements) qui me procure le plus de satisfaction. Le fait d’avoir un super groupe de jeunes joueurs avec qui s’entraîner a également beaucoup contribué à développer cette passion grandissante.

Quels adjectifs utiliserais tu pour caractériser ce sport? 
C’est difficile de n’en choisir que quelques-uns mais je dirais : rapide, technique, excitant, complet et chronophage !

Ta famille est soudée autour de ce sport et de ce magnifique club, par qui cette passion commune est elle arrivée et comment? 
En effet, cette passion est aujourd’hui commune à tous les membres de la famille peu importe leur âge. A la fin des années 1980, mon père a décidé de partir en Argentine pour s’occuper d’une exploitation agricole près de Cordoba, avant de reprendre le domaine familial ici à Mies. Il est revenu avec trois chevaux de polo et un argentin, c’était le début de l’aventure ! Aujourd’hui c’est grâce à lui (ou de sa faute) si on vit, parle, respire polo ici.

Le polo est un sport très physique, est ce que tu as une hygiène de vie particulière?
Je monte à cheval tous les jours, que ça soit en entraînement, match ou pour donner des cours. Le cardio est également assez important, mais je dois dire que comme j’ai des journées ou je bouge beaucoup, je n’ai pas toujours le courage et l’envie d’aller courir ! Les étirements sont également primordiaux afin d’éviter les blessures. Là où je dois faire plus attention depuis quelques années c’est plutôt sur la nutrition, car j’ai toujours été assez gourmand. Plus sérieusement, la plupart des gens pensent que dans le polo c’est surtout le cheval qui se fatigue, ce qui n’est pas faux. Par contre, pour avoir également pratiqué le football, je peux vous assurer que je suis beaucoup plus fatigué après un match de polo qu’un match de foot !

Peux tu nous décrire une journée type de joueur de polo professionnel?
Les miennes sont un peu différentes du fait de mes différentes casquettes, mais quand je pars en tournoi à l’extérieur, elles sont assez routinières en fait : on commence par aller le matin aux écuries pour voir les chevaux, discuter avec son groom et gérer avec lui les différents soins. On assiste ensuite son groom lors de l’entraînement, puis on se retrouve avec ses coéquipiers à midi pour partager un repas et discuter de la tactique du prochain match. Après une bénéfique courte sieste, on se déplace au terrain pour le match. Une fois celui-ci terminé, on retourne aux écuries pour superviser les soins d’après-match (douche, bottes de glace, bandages de repos).

Combien de matches as tu réalisé depuis tes débuts, quel est ton plus beau souvenir?
C’est une bonne question, je crois n’avoir jamais pris le temps de compter !
Mais je pense environ 70-80 matches par saison, soit environ 1500 matches depuis mes débuts. J’ai énormément de très bons souvenirs, mais je pense que notre victoire en 2009 lors du Jaeger-LeCoultre Polo Masters « en famille » avec mon frère, mon père et Alexis, un ami uruguayen est l’un des meilleurs moments, tout comme nos différentes participations mon frère et moi aux championnats d’Europe avec la Suisse.

Quels  joueurs admires tu? 
Je n’ai pas de joueur favori que j’admire particulièrement ; je prends beaucoup de plaisir à voir jouer les meilleurs joueurs du monde comme Adolfito Cambiaso, Facundo Pieres ou Hilario Ulloa. Plus jeune par contre, j’étais un grand fan de Bartolomé Castagnola, j’ai même porté le même casque et les mêmes bottes que lui pendant quelques années. J’aimais son côté un peu fou sur le terrain et son style décalé et rustique qui jurait avec les autres joueurs, avec ses pantalons troués et ses bottes à scratch.

Ton prochain match?
Ce weekend à Moscou, pour l’International Cup. C’est un magnifique club où j’ai toujours beaucoup de plaisir à aller jouer, et où la famille Rodzianko nous réserve toujours un excellent accueil.

Est ce que tu as d’autres passions?
Côté sport, je suis un passionné de hockey sur glace, et je suis un grand fan du Geneve-Servette Hockey Club. Même si c’est un sport que je n’ai jamais pratiqué, je lui trouve beaucoup de similitudes avec le polo, comme la vitesse, l’équilibre, la rudesse et le respect de l’adversaire. La saison étant également inversée par rapport à celle du polo, ça me laisse plus le temps de suivre les matchs que ceux d’un autre sport. Sinon, l’hiver étant un peu plus tranquille pour nous, mon épouse et moi en profitons pour voyager et découvrir ensemble de nouveaux endroits dans le monde.

Quels conseils donnerais tu a un joueur de polo débutant?
Le côté « équitation » est vraiment primordial. Si on est pas cavalier, il faut passer des heures dans la selle, même si ça n’est pas sur un cheval de polo, mais lors d’un cours de saut, ou d’une autre discipline. La discipline et la persévérance sont également importants ; on ne pourra jamais devenir un bon joueur de polo si l’on ne s’entraîne pas une fois par semaine au minimum.

Quels sont tes projets et défis pour les années à venir?
C’est une bonne question. Le monde du polo évolue, et aujourd’hui je pense que les belles années du polo, où les joueurs disposaient de budget sans fond, sont révolues. Il faut aujourd’hui proposer un service clé en main et à la carte, comme cela se fait dans d’autres sports. La plupart des clubs de polo possèdent aujourd’hui un grand nombre de chevaux disponible à la location à l’heure, ou même à la période de jeu pour les clients occasionnels qui ne possèdent pas leurs propres montures. Mais cela a un coût énorme pour les entreprises qui mettent ces services en place. En ce qui concerne le Polo Club de Veytay, je pense que l’avenir se tourne vers le polo événementiel ; c’est-à-dire l’organisation de tournois comme le Jaeger-LeCoultre Polo Masters, qui fonctionne très bien et qui peut être encore développé, ou par des événements d’entreprise où l’on propose des initiations, matches de démonstration ou encore des asados (grillades argentines typiques). Nous avons de plus en plus de demandes d’entreprises à la recherche d’un bel endroit pouvant accueillir de 10 à 2000 convives. Cet été par exemple, nous avons eu deux événements pour plus de 700 personnes, et nous avons déjà un grand nombre de réservations pour 2018.

 

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Crédit Photos: Jeremy Spierer

Rencontre avec Grégoire Mangeat, entre Art et Bâtonnat à Genève.

Bâtonnier de l’ordre des avocats de Genève depuis 2016, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste cette fonction ?

Le Bâtonnier est en quelque sorte un « chef de famille », élu par ses pairs. Il préside l’Ordre des avocats. Il conçoit et propose des solutions de paix lorsque les avocats s’adressent des reproches ou lorsque des clients sont mécontents. Il représente les avocats lors de cérémonies officielles, en Suisse comme à l’étranger. Il est l’interlocuteur des autorités, en particulier du Pouvoir judiciaire, pour toutes les questions qui se posent en lien avec l’exercice du métier, l’accès au droit et à la justice. Il lui appartient enfin de prendre la mesure des évolutions du métier, des attentes du public, afin de porter au sein même de la profession les réformes et les adaptations nécessaires.

Quelles sont les principales missions de la Maison des Avocats de Genève située en vieille ville ? 

La Maison des Avocats est le lieu central de la vie de l’Ordre. Elle est un repère, un lieu d’accueil, un lieu de conciliation. Elle est une sorte de maison familiale, à disposition de l’ensemble des avocats.

Vous êtes à la tête de votre étude d’avocat, pouvez-vous nous dire quels sont vos terrains de prédilection ? Combien de collaborateurs comptez-vous?

Je ne suis que l’un des cinq associés actuels de l’étude. Six collaborateurs, trois stagiaires, un paralegal et trois assistantes font partie intégrante du cabinet. L’étude est de taille moyenne, à l’échelle du barreau de Genève. Mon équipe ne traite par exemple que de litiges, mais dans des situations très variées de la vie courante. Une part importante de mon activité concerne la criminalité économique sous toutes ses formes (gestion déloyale ; faux dans les titres ; fraudes ; fonds bloqués ; demandes d’entraide entre États ; extradition ; etc.)

En quoi le métier d’avocat en Suisse diffère de celui d’avocat aux USA ?

Les différences ne sont pas aussi importantes que les films ou les séries pourraient le laisser penser. Dans mon domaine d’activité, de plus en plus souvent, des « deals de justice », c’est-à-dire des solutions négociées avec un procureur, remplacent le procès tel que vous l’imaginez, avec ses salles d’audience boisées et la mise en scène qui l’accompagne. Dans l’affaire de la FIFA, où des personnes ont été arrêtées dans un hôtel à Zurich puis réclamées par Washington, j’ai beaucoup travaillé avec un avocat new-yorkais, ancien procureur fédéral. Je n’ai jamais ressenti qu’il y aurait eu une différence significative dans l’exercice de notre métier. En revanche, des différences procédurales ont un impact énorme sur les priorités de l’avocat. Par exemple, dans le cas de la FIFA précité, l’avocat new-yorkais a passé plus de huit mois à préparer, puis à négocier les conditions d’obtention d’une liberté provisoire, dans l’hypothèse (combattue à l’époque) d’une future extradition de notre client, de la Suisse vers les États-Unis.

Racontez-nous votre parcours d’homme et d’avocat.

Votre question suggère que j’aurais déjà quelque chose à raconter sur ces deux sujets… Après dix-huit ans de métier, je commence seulement de pouvoir énoncer ce qui me paraît être décisif pour l’accomplissement de sa vie d’avocat – attention, ça ne fait pas forcément rêver : se faire des exigences de qualité très élevées ; savoir écouter l’autre ; savoir faire parler les gens ; susciter respect et confiance ; et cultiver une indépendance au-dessus de la moyenne. Disons que si tout cela fonctionne, l’avocat est plus serein, et l’homme – par effet d’entraînement – devient plus agréable. L’enjeu, cette sérénité, j’en suis encore assez éloigné. Il paraît que mon indice de Positivity, comme disent les anglo-saxons, soit ma capacité à tenir à distance les pensées inquiètes, est encore trop faible.

Nous notons que vous avez un penchant prononcé pour l’art contemporain sur votre site internet. Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez intégré l’art et le design à votre métier d’avocat ?

Ma mère est céramiste et sculptrice ; mon père est architecte. J’ai passé l’entier de mes vacances scolaires, pendant vingt ans, au milieu de tas de cailloux – sur des sites archéologiques – ou dans des musées. Je ne suis pas en train de réécrire l’histoire et d’essayer de vous faire croire que c’était drôle. Mais disons que j’ai toujours côtoyé l’art, que ce soit comme interrogation ou bousculement du réel, ou dans sa dimension esthétique.

Quels sont les personnages qui vous inspirent ?

Ceux qui produisent du beau et de l’émotion avec peu. Avec très peu, même.

Que faites-vous de votre « peu » de temps libre ?

Ce sont des respirations. J’essaie de lire, de découvrir, ou de relire, de redécouvrir. Je pense qu’il faut saturer le temps et l’espace. Je rate un nouveau plat en cuisine. Je bats la mesure, de façon assez ridicule, au milieu du salon, pour essayer de ressembler au compositeur ou au chef d’orchestre du début du XXe siècle que je ne serai jamais. Un compositeur moderne, mais pas révolutionnaire. Et puis la réalité me rattrape à peu près 4 minutes plus tard…

Lors de la dernière soirée des avocats en avril 2017, vous avez promu le travail d’une artiste locale Juliette Roduit, quel était l’objectif de cette action ?

J’ai voulu qu’il y ait un studio photo dans la salle, que les invités puissent investir de façon très libre tout au long de la soirée. Comme je ne voulais pas d’un décor qui aurait déjà été utilisé vingt fois à Genève pour des mariages ou des soirées de fin d’année de banquiers privés, je me suis tourné vers Juliette Roduit pour un décor original, pour une véritable proposition d’artiste sur la base de l’idée que j’avais exprimée.

Quel est pour vous le futur des cabinets d’avocats ?

Je rêve d’une société où toute personne, quelle qu’elle soit, quel que soit en particulier son niveau de revenus, et quelle que soit sa question, ait accès à un avocat et à des mécanismes de résolution des conflits. Il n’y a donc pas un « futur » unique des cabinets d’avocats. Il y aura bientôt, je l’espère, plusieurs types de cabinets d’avocats, organisés de façon très différente, et très adaptés aux besoins d’un public cible. Aujourd’hui, le cabinet qui reçoit la succession d’un roi déchu ressemble à s’y méprendre au cabinet qui conseille une start-up créée par trois jeunes de 26 ans qui programment des algorithmes. Mêmes dorures. Mêmes papiers. Mêmes cravates. C’est un peu ridicule, et cela rend un peu compte du degré d’ankylose du monde des avocats.

Quel est l’un de vos objectifs pour les années à venir ?

Me montrer particulièrement inspirant pour les jeunes qui choisissent de travailler au sein de notre étude. Aider plus que tout mes clients. Faire reconnaître l’étude comme étant l’une des meilleures d’ici cinq à dix ans. Puis atteindre soudainement une forme de simplicité, d’épure même, qui arrose de bonheur tout mon entourage. Je me mets au travail immédiatement…

 

www.mangeat.ch 

Credit photos: Jeremy Spierer